Qu'en toutes choses Dieu soit glorifié !
(Chapitre 57)
La gloire de Dieu, c'est l'homme vivant : " Gloria Dei, homo vivens" (saint Irénée). Toute la vie de l'homme, ici- bas commencée, est de glorifier Dieu.
Le moine, plongeant inlassablement en ses " Gloire à Dieu ", cherche et trouve dans la Trinité le sens et la saveur de toute la vie.
C'est la hantise des enfants de Dieu de vivre en tout au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.
La Trinité est un mystère. Mais le mystère n'est pas impénétrable. S'il est " incompréhensible ", c'est en ce sens que l'homme n'aura jamais fini de le comprendre, d'entrer en lui, de le pénétrer. Nous ne sommes en rien entrés plus réellement et plus profondément qu'en la Trinité. Elle est notre domaine essentiel, notre royaume, notre plus authentique milieu de vie.
La Trinité en effet est tout le contraire d'une société fermée. Elle est tout l'Amour, c'est-à-dire tout ce qui est d'ouvert. d'accueillant. d'aspirant. Qui la prétend inaccessible trahit la réalité de son mystère. La Trinité est essentiellement un mystère ouvert. un mystère d'accueil : nous sommes accueillis sans trêve au cœur de la vie de Dieu et sans trêve son amour afflue au plus secret de notre être. Nous vivons dans l'intimité des personnes divines. Dieu, c'est l'Intime.
La gloire de Dieu n'est donc pas distante et étrangère, mais présente et familière. Elle nous assiège, elle nous enveloppe, elle est au milieu de nous. Son emprise aspire le moine, et fait de lui, par toute sa vie, un alléluia.
Tout chrétien entre en Trinité au jour de son baptême. Il y entre marqué du Fils comme un enfant sauvé, ressuscité. un enfant d'autant plus aimé qu'il a beaucoup coûté. Il y entre avec un mot sur les lèvres. le mot appris du Fils. gagné de lui par tous les hommes : Abba, c'est-à-dire Père!
Le Pater est le bien de tous, le titre à l'éternité, la charte de bonheur. Il est le droit à la parole et la parole même avant laquelle on n'a rien dit et après laquelle on n'ajoute rien. Cette parole est pour tous la même et tous en elle ne font qu'un, mais dans la bouche de chacun, elle a valeur unique car chacun pour le Père est un unique enfant.
Le moine plonge en ses Pater. Filialement, silencieusement, il y adore le Nom du Père, son règne, sa volonté. L'adorant saute dans la gloire. Il touche à Dieu directement dans l'exclusion de tout le reste. Il est tiré du rayonnement de la gloire dans son foyer même. Plus l'homme adore Dieu, plus il le glorifie. L'homme glorifie Dieu en rejoignant sa gloire.
Tout le poids des actes humains est qu'ils glorifient Dieu. Ils sont tous des chemins vers lui. " Pour le saint tout est occasion" (LouisLavelle) Mais la tentation est forte de ne rendre gloire qu'en certaines choses. L'homme bute sur sa misère,il s'isole dans sa souffrance. il s'enferme dans son péché. Il se cabre devant la croix.
La croix pourtant est la suprême gloire de Dieu, le signe de sa victoire sur le péché et sur la mort. Le signe de la croix est en même temps signe de la glorieuse Trinité. Rien plus que l'offense pardonnée, plus que la souffrance offerte, plus que le péché vaincu ne glorifie l'amour.
La gloire de Dieu c'est le Christ. L'homme vivant, c'est lui.